Archives mensuelles : octobre 2013

Équations du quatrième degré à coefficients réels

Robert est un participant assidu du congrès de mathématiques appliquées de Tournedos-sur-Côte-d’Amour. Citoyen d’un canton voisin et professeur à la retraite, il adore chaque année venir flâner dans les couloirs du Zénith de Tournedos (et oui, encore un Zénith !), assister aux conférences variées et diverses se tenant dans le grand auditorium et ses annexes et y retrouver ses collègues comme on retrouve d’un été sur l’autre ses voisins de camping. Mais il aime probablement par-dessus tout se joindre à la foule qui se presse le dernier jour devant le grand buffet offert par la mairie pour célébrer les lauréats du prix Euler de Tournedos. Le champagne a pour habitude de couler à flots au cours de cette soirée mais Robert consomme toujours avec modération le pétillant breuvage, se limitant à une seule coupe, et ce sans faillir depuis plus de dix années. Il pousse même la coquetterie jusqu’à calculer exactement le volume de boisson pétillante qu’on lui offre. Pour ce faire, il se munit chaque année d’un double décimètre et d’une olive verte dont il a pris soin de mesurer le volume à l’aide d’une éprouvette graduée.

Une fois que l’un des nombreux serveurs, par ailleurs tous tirés à quatre épingles, lui a remis une coupe de champagne, il y glisse discrètement son olive et mesure la variation de hauteur qui en résulte. Cette année, son olive avait un volume de 5 cm3 et le champagne s’est vu rehaussé de 4 mm. Sachant que le profil des coupes suit l’équation y = |x| (une information confidentielle obtenue du fabricant après moult négociations), il en a déduit immédiatement que le volume qu’il avait consommé était de 0,5 cm3. Comment a-t-il procédé ?

Afin de percer son secret, commençons par fixer quelques notations. Ainsi, sur le schéma ci-contre, on se définit un axe vertical (Ox) ayant pour origine le fond de la coupe et on considère les hauteurs h1 et h2 avant et après l’introduction de l’olive et on note ΔV la variation de volume correspondante. On voit immédiatement que, pour une hauteur x, d’après l’équation du profil, r = x2. Il vient alors :

Puis en considérant que h2 = h1 + 0,4, il s’ensuit, grâce à notre ami Pascal :

Une expression dont nos amis informaticiens apprécieront les coefficients :-). Puisque ΔV = 5, on obtient au final :

Nous sommes donc amenés à résoudre une équation du quatrième degré ax4 + bx3 + cx2 + dx + e = 0. La méthode de Ferrari nous apprend qu’il faut commencer par poser le changement de variable :

Ceci nous ramène en effet à l’équation :

Un terme en moins, cela fait toujours plaisir :-). Les coefficients p, q et r valent :

Arrivé à cette étape, on cherche les solutions de l’équation intermédiaire (nous en verrons la raison quelques lignes plus bas) :

Il s’agit d’une équation du troisième degré et la méthode de Cardan nous permet d’en trouver au moins une solution réelle que l’on note y0. On a alors l’équivalence :

avec :

 

On reconnaît une identité remarquable du troisième type dans (z2 + y02)2 – (az0 + b0)2. L’équation précédente devient donc :

Il nous suffit donc de résoudre les deux équations du second degré :

pour obtenir les quatre solutions de l’équation en z puis d’utiliser :

pour trouver les solutions de l’équation initiale.

Si nous appliquons la méthode de Ferrari à notre équation, à savoir :

nous obtenons :

Puis :

Et donc l’équation simplifiée du quatrième degré est :

On peut remarquer ici l’apparition d’une équation bicarrée qu’il serait possible de résoudre par la méthode idoine. Mais nous fermons les yeux sur cette constatation afin d’illustrer jusqu’à son terme la méthode de Ferrari :-)

L’équation du troisième degré est :

La méthode de Cardan nous donne comme seule solution réelle :

Ainsi :

et on peut choisir :

Et nous avons donc à résoudre les deux équations du second degré :

Nous ne sommes intéressés que par les solutions réelles :

Donc, au final, en revenant à x :

Seule la seconde solution est réaliste (la première étant négative). Elle correspond à la hauteur du champagne avant que Robert n’y plonge son olive. Il ne nous reste plus qu’à calculer le volume ingurgité par Robert :

Nous retrouvons bien la valeur calculée par ce sacré Robert dont on peut au passage louer la sobriété !

Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thode_de_Ferrari

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